Dans cet article, on parle de l’ambivalence du sacrifice paternel et de la charge mentale des hommes.
Tout cela en lien avec
– la charge mentale des femmes
– l’aliénation (de tous) résultant des mythologies de notre société.
Êtes-vous – ou avez-vous été – en couple avec un homme qui est marié à son travail ? Un homme épuisé par une journée en partie vécue comme un sacrifice.
Bref, un homme en charge mentale ?
Un homme qui n’est jamais là…
Qui rentre tard.
Qui, quand il est à la maison, est présent physiquement et absent mentalement.
Il paie tout et assure la subsistance : pourvoir, c’est son job d’homme, de mari et de père.
Et vous, eh bien, en plus du reste, vous organisez le bonheur, les futurs souvenirs, les photos que les enfants verront dans les albums quand ils auront grandi.
(Et quand vous aurez divorcé, vos enfants vous diront, incrédules : « Je ne te comprends pas : sur les photos, la famille rayonne de bonheur »)
Charge mentale = aliénation
La charge mentale relève de ce que Marx et d’autres ont appelé l’aliénation.
L’aliénation – pour faire simple – c’est le fait d’adopter une identité à travers laquelle on se trahit et se maltraite soi-même.
Cette identité, on l’acquiert du simple fait qu’on appartient à une culture.
Pour assurer sa cohésion, toute société sécrète des récits qui constituent des mythologies collectives.
Comme ils ont baigné dedans dès leur toute petite enfance et comme leurs parent les incarnent au quotidien, chaque citoyen y croit. Ils croient que le monde est tel que le décrivent ces récits collectifs.
Sacrifice, culture et charge mentale
Que nous soyons laïc ou croyant, la culture occidentale repose sur un substrat chrétien qui a instillé dans notre univers de référence la « valeur sacrifice ».
Même si ça fait mal, se sacrifier, c’est vertueux. Ca nous auréole intérieurement d’une aura de sainteté.
Les mères se sacrifient.
Les pères aussi.
(Pas toutes et pas tous, certes )
Se sacrifier, c’est prendre en charge plus qu’on ne peut le supporter au profit des autres, tout en négligeant ses propres besoins.
Et cette éthique du sacrifice affecte les hommes comme les femmes : oui, même s’ils n’en parlent pas, la charge mentale des hommes existe.
Elle est différente de celle des femmes. Et pourtant elle est renforcée par la pauvreté communicationnelle au sein de la famille, tout comme celle des femmes.
Charge mentale, sacrifice et fuite
Le sacrifice, c’est aussi une fuite.
Oui, c’est bizarre : sans réfléchir, on pourrait penser que l’on se sacrifie par amour.
Cependant, c’est un acte très ambivalent qui inclut aussi de la colère, de la haine et un sentiment d’être la victime, en même temps que le héros.
Pourquoi le sacrifice est-il une fuite ?
Parce que la personne (le père et la mère) se noie dans l’action.
Et, même s’il y a de la douleur, le fait de se noyer dans l’action lui évite un stress encore plus grand : le stress lié aux relations.
En résumé, se sacrifier en abattant des heures de travail, c’est une stratégie d’évitement : pendant qu’on s’épuise au travail pour ramener un gros salaire au service du confort de sa famille – [équivalent féminin : « pendant qu’on nettoie sa maison entière pour le bien-être de sa famille »] – on évite d’être en lien avec sa partenaire et ses enfants.
Lors d’un entretien, Isabelle Filliozat me disait d’ailleurs que des statistiques indiquent que les pères rentrent 1/2 heure plus tard quand l’enfant paraît.
Sacrifice, fuite et insécurité
Pour comprendre ce mécanisme, on peut s’en référer aux modèles éducatifs en vigueur dans la société occidentale.
Il estime que la société occidentale normalise une éducation abusive qui prive les enfants de réponses adéquates à leurs besoins fondamentaux d’attachement.
La qualité de liens dont les petits ont besoin est une véritable prérogative biologique, écrit Gabor Maté, puisque la neurobiologie interpersonnelle permet le bon développement du cerveau et du système nerveux.
Privés d’interactions de base d’une qualité suffisante, la large majorité d’entre nous ont développé des traumas – des lésions dans le système nerveux – qui affectent diversement nos capacités, notre personnalité, nos comportements, notre manière d’être en relations.
L’une des conséquence résultant du fait de n’avoir pas bénéficié de cet attachement sécure : la plupart d’entre nous vont se réfugier dans des conduites addictives qui ont pour rôle de nous consoler et de nous faire oublier momentanément le grand vide qui nous habite.
Ces addictions sont parfois hautement validées sur le plan des valeurs collectives : c’est le cas des études, du travail et… du sacrifice.
Sacrifice, charge mentale et rationalisation
Ainsi, tout comme celui de la mère, le sacrifice du père s’apparente à un évitement : pendant qu’il est absent, il évite le champ de mines que sont les relations affectives au sein de sa famille.
Et il rationalise son choix – tout comme la mère qui se sacrifie rationalise le sien – en disant que c’est pour le bien-être de sa famille.
Ce faisant, il obtient la validation du groupe. Il est irréprochablement vertueux.
Idem pour la femme qui se sacrifie.
Et pourtant, comme je l’ai évoqué ci-dessus, le bien-être de la famille ne tient pas qu’aux choses matérielles. Loin de là.
Cliquez sur cette image : vous découvrirez deux courtes vidéos qui se répondent.
– Un homme qui se glorifie d’avoir été absent.
– Une avocate qui explique le tort que cela fait aux familles.
Sacrifice, charge mentale et négligence
J’en ai parlé par ailleurs à propos de l’ergomanie des femmes : cette dernière peut être une stratégie d’évitement : pendant que l’on travaille, on n’interagit pas avec ses enfants.
L’ennui, c’est qu’en pourvoyant à la subsistance de sa famille, même si cela représente un sacrifice, un homme néglige leurs besoins les plus fondamentaux : les besoins d’attachement.
La véritable nourriture de tout être vivant, ce sont les liens.
En l’oubliant, on passe à côté de ce qu’est véritablement la vie.
En résumé, se sacrifier, c’est un choix qui est vraiment à reconsidérer si l’on se raconte qu’on se sacrifie par amour pour sa famille.
Aimer, c’est une compétence à apprendre et à réintégrer de toute urgence au sein des familles pour la santé mentale et émotionnelle de chacun. Et même pour la santé au sens littéral.
Si ce billet vous donne envie d’aller plus loin
Téléchargez ce test qui va vous permettre d’évaluer
à quel point vous êtes en charge mentale.
Cliquez sur l’image
PS : A part ça, et chez vous, comment ça se déroule ?
Avez-vous déjà interrogé votre conjoint au sujet de sa charge mentale (celle qui n’a rien à voir avec la vôtre) ?
Qu’en avez-vous tiré comme enseignement ?
Si ce billet vous a inspiré.e, partagez-le en cliquant sur les icones de partage ci-dessous. Merci pour celles et ceux qui le découvriront grâce à vous !
Leave a comment